En ce moment :
La vie en rose, CDAR, Villodon, jusqu'au 4 avril 2025.
Abysses, exposition collective avec le collectif Dire Autrement, La Grange aux Dîmes, à Rots, les week-ends du 29-30 mars & 5-6 avril 2025.
A venir :
"Rétrospective 2014/2024" 100+, Réalité art actuel en Pré-Bocage Normand,
Galerie de la Teinturerie, du 23 mai au 5 juin 2025, vernissage samedi 24 mai 11h00.
Fragments, exposition collective avec le collectif Dire Autrement, la Menuiserie / Kalbass'Art, Clécy, les week-ends du 10-11 mai & 17-18 mai 2025.
Fragments, exposition collective avec le collectif Dire Autrement, Fleury, 24-25 mai 2025.
Abysses, exposition collective avec le collectif Dire Autrement, La Bouée, Cherbourg, 2026.
Tunique(s) de peau(x)
Genèse 3, 21 :
Et {Yahweh/Dieu} fit à Adam et à sa femme des tuniques de peau et il les en revêtit.
Autour de mes recherches, vient très vite l’idée des enveloppes charnelles d’Eve et Adam, comme des enveloppes impersonnelles (ou personnelles puisqu’elles sont tatouées) que nous pourrions tous enfiler. Des golems de tissus, qui seront déclinés dans plusieurs couleurs de peau, brodées ou tatoués de diverses manières.
Le texte de réflexion sur notre incarnation de Sylviane Agacinski résonne et renforce ma pensée : « Le premier acte de ce drame, c’est la création de l’homme, être spirituel « à l’image et à la ressemblance de Dieu ». Son dénouement, c’est l’espérance chrétienne en une vie éternelle, détachée de ces « tuniques de peau » dans lesquelles Adam et Eve avaient été condamnés à vivre, après avoir été chassé du jardin d’Eden.[...] La puissance technoscientifique règne aujourd’hui sur l’ensemble de la nature, y compris celle de l’homme lui-même. Un homme nouveau se profile, non plus en rêve ou dans l’au-delà mais ici-bas. Les nouveaux croyants entendent échanger leurs vieilles tuniques de peau contre un corps dont ils seront les « fabricants souverains » : corps restauré et augmenté corps, corps fabriqués sans père ni mère, et non plus engendré ; corps reconsrtruit et neutre, par-delà l’homme et la femme ; corps de moins en moins vulnérable mais de moins en moins vivant. »1
transhumanophore : sommes-nous une forme dégradée d’Eve et d’Adam ?
Auquel cas un retour aux sources serait un progrès vers une humanité augmentée.
S’habiller d’Adam et Eve serait un retour vers une humanité parfaite, une manière de transhumanisme spirituel. La chair sert d’excuse à notre imperfection, pour se dispenser d’accepter nos défauts.
La totipotence de l’âme : si l’on ne songe qu’à améliorer le corps, cela présuppose que l’esprit, que l’âme, soit déjà parfaite, optimale. Ce présupposé est-il fondé ?
Le transhumanisme, sur le plan spirituel est une préoccupation très ancienne, depuis au moins deux mil ans. Le bouddhisme croit en la métempsychose selon le bien et le mal que l’on a fait dans nos vies. Les shintoïstes ont des momies vivantes : prêtres qui se sont mis en momification de leur vivant.
Est-on obligé de faire des sculptures en nouille pour parler de notre condition humaine (Patman de Michel Blazy ou Théo Mercier, 2010) faut-il des œuvres qui nécessite un entretien permanent, alors que les œuvres sont non-pérenne comme le reste de la planète et qu’elles se dégradent ? Vous achèterez le concept d’une banane scotchée sur un mur que vous changerez toutes les deux semaines… Les œuvres qu’on accroche sur un mur et que l’on oublie, c’est terminé, pour les regarder, il faut qu’elles se rappellent à vous par l’odeur de la pourriture… non seulement ces sculptures ont des peaux de nouilles, mais leur organicité est similaire à leur apparence. Elles ont pour elles d’être comme la figure du Golem, une immense forme de boue. La créature née de l’homme, capable de se mouvoir et de peut-être, le dépasser… Notre peau n’est-elle pas une muqueuse asséchée ?
Et en parlant de peau, les pommes aussi ont des pores. Elle ressemble à des petits corps ronds et fermes qui se fripent et pourrissent en vieillissant, elles portent en elles des graines, plus où moins fertiles. Bref, les pommes sont des corps comme les autres.
1 Sylviane Agacinsky, L’homme désincarné, du corps charnel au corps fabriqué, Tracts Galimmard n°7, 2019.
Pour St Thomas d'Aquin dans sa Somme théologique, les tuniques de peau représentent notre condition mortelle :
Pareillement aussi, en ce qui concerne l’âme, est décrit le triple châtiment qui fut le leur. Premièrement, quant à la confusion qu’ils éprouvèrent de la rébellion de la chair contre l’esprit ; c’est pourquoi il est dit : " Alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils connurent qu’ils étaient nus. " Deuxièmement, quant au remords de leur propre faute ; c’est pourquoi il est dit : " Voilà que l’homme est devenu comme l’un de nous pour connaître le bien et le mal. " Troisièmement, quant au rappel de la mort à venir ; c’est pourquoi il est dit à l’homme : " Tu es glaise, et tu retourneras à la glaise. " Que " Dieu leur fit des tuniques de peau " est aussi un signe de leur mortalité.
Pour certains, ces vêtements de peau pourraient impliquer qu'un animal ait été tué. C'est une des premières allusions au sacrifice du Christ. Pour d’autres, ces "Tuniques de peau" remplacent ici les "feuilles de figuier", ce sont donc des vêtements plus durables/solides… montrant que Dieu a soin de ces êtres coupables comme un parent envers ses enfants en dépit du péché qui rend nécessaire le vêtement, afin d'atténuer l'emprise du corps sur l'esprit.
{Dieu} les a revêtus de manière efficace par des vêtements qu'Il pouvait agréer, comme le chrétien est revêtu de Christ.
Le vêtement révèle la nudité, et révèle en même temps la peur de découvrir cette nudité.
Les animaux, par exemple, n'ont pas de vêtements, et personne ne dit qu'ils sont nus. Ils ne sont pas nus, précisément parce qu'ils n'ont pas de vêtements. Tandis que l'homme est nu précisément parce qu'il a un vêtement.
Par ailleurs, lorsque quelqu'un commet une faute, ne dit-on pas qu'il a peur d'être "découvert" ? Les champs lexicaux des textes et du textiles s'emmêlent. De nombreux juifs ne sont-ils pas tailleurs ?
Et si auparavant Eve et Adam n'avaient pas de peau, qu'avaient-ils ? Qu'étaient-ils ?







Exposition dans la galerie du Trianon (2022) avec les artistes The Grunge Fairy dont on voit des oeuvres sur le mur, et Nadine Prioult.
Exposition à Condé en Normandie (2021) avec la série Eve.